2.5 : une note un peu SVC 2.0, puisque le plaisir que j'ai pris à ce film est avant tout lié au sentiment de confort nostalgique conféré par la patine quasi anachronique de cette production ultra-néoclassique. Ce serait injuste en même temps de dire que ce film n'est pas ancré dans son temps (société de l'information, espionnage, médias, murs, etc.), mais il l'est seulement au prix de stratégies très apparentes et d'un discours "humaniste" ultra-individualiste assez insoutenable (dans un monde dominé par l'incertitude, seule compte la conscience personnelle des actes...). Spoiler alert: dommage au fond qu'à la fin, lorsque le personnage de Hanks regarde par la fenêtre du métro, le film ne donne pas à voir un jeune Noir courir et se faire tirer une balle dans le dos par un policier blanc, cela n'aurait pas pris une ride... |
Un bon film, bien écrit et surtout bien dialogué, souvent drôle. Hanks et surtout Mark Rylance sont très bien. Comme souvent Spielberg gâche un peu ses dix dernières minutes. |
Deux étoiles, avant tout pour la seconde partie du film à Berlin, le jeu des deux acteurs principaux (Hanks étonnamment sobre), un rythme plutôt maîtrisé, et une alliance assez réussie entre tension dramatique et touches comiques (tenue jusqu'à la fin, avec le plan de Hanks affalé sur son lit, épuisé). En revanche, c'est un film qui rate totalement son sujet; comme le dit Charles, le récit gravite autour de l'avocat, de ses choix personnels, moraux (le confort de ma famille? ou le devoir envers... quoi au fond? la patrie? la justice? un impératif moral transcendant? ça n'est pas clair du tout), alors que la seule et unique histoire qui méritait véritablement d'être racontée, c'est bien celle de ce moment clé de la confrontation entre deux blocs idéologiques qui ne se comprennent pas et ne veulent pas se comprendre, une confrontation qui se cristallise "symboliquement" autour de l'érection du mur à Berlin (magnifiques séquences dès que le récit nous mène à proximité de cette frontière) – mais un mur qui peut très bien en symboliser d'autres, ainsi que le suggère un plan vers la fin du film (cf. là encore le commentaire de Charles), dimension qui aurait pu ou dû être renforcée (sans forcément être explicitée totalement). De fait, toute la première partie (l'arrestation et le procès d'Abel) aurait à mon sens dû être ramenée à un quart d'heure de film, afin de poser une situation narrative, sans plus, et de tresser le récit autour de la description de Berlin, des négociations idéologiques et politiques ou encore de ce conflit – extrêmement intéressant – entre autorités soviétiques et est-allemandes (alors que là ce ne sont que des péripéties qui viennent dénouer la tension narrative... or cela devrait être d'emblée le lieu de la complication, de la mise en tension). Le film aurait immensément gagné en hauteur de vue, en profondeur de réflexion historique et politique (ce qui est quand même l'ambition de Spielberg depuis des lustres), en épaisseur interdiscursive (notre passé et notre présent). Même chose pour toutes ces scènes interminables où l'on nous montre le pilote américain qui va se faire dézinguer par les Soviétiques, qui se fait juger, interroger... Mais qu'est-ce qu'on s'en tape! Surtout que ça ne sert qu'à montrer à quel point les Soviétiques sont vraiment des gros méchants (on se croirait dans un James Bond des années 1980) qui torturent leurs prisonniers de guerre – alors que bien sûr les Américains, eux, ont demandé très poliment à l'espion russe s'il voulait collaborer (eh, Steven, on est quand même dans un monde post-Abou Ghraib, s'il te plaît, arrêtons avec ces dichotomies simplistes). Et la musique! D'un bout à l'autre, j'ai dû réprimer des hauts-le-cœur! Berk. |
Je ne te trouve pas très juste Vincent, car si on met bout-à-bout les séquences sur le pilote américain, je pense qu'on arrive péniblement à 10 minutes sur les 141 du film! Je trouve plus pertinent la question des représentations. Ce qui me gêne le plus, c'est que l'espion russe soit à la fois un sur-homme (au point d'être inhumain) et un cool guy (l'artiste philosophe fidèle). Ça rend quand même l'adhésion à la position de Donovan singulièrement plus facile que si l'espion était présenté comme un salaud total. Les est-allemands sont aussi présentés comme des bouffons... Cela dit, on ne peut pas dire qu'entre les kangaroo courts, les civils abandonnés et les militaires priés de mourir plutôt que de se faire capturer, Spielberg fasse une représentation très élogieuse des américains autre que son personnage principal. Au passage, sur la question du traitement des prisonniers, il me semble que tu es aussi un peu dur Vincent, Abel évoquant quand même un lieu de détention chaud et humide où il a été en avion (difficile de ne pas penser à Guantanamo) et Donovan cite en brillant exemple du due process américain le procès des Rosenberg qui, si il n'a pas été la parodie de procès antisémite évoquée par les européens de l'époque, a quand même été entaché de problèmes procéduraux et, avec les connaissances actuelles, il semble que la peine pour l'époux a été trop lourde et celle pour l'épouse injustifiée. Oups! Pour moi le sujet c'est vraiment le moujik stoïque, celui qui fait ce qui est juste même si ça lui en coûte (première partie du film) et même si c'est la voie la plus difficile (deuxième partie du film). Je dois avouer que je suis très très bon public pour ce type d'histoires et le fait que celle-ci ait des résonances avec l'actualité ne gâche rien. Je suis assez d'accord sur la fin par contre. Si c'est assez classe d'avoir un personnage dont la satisfaction du moment est immédiatement tempérée par le rappel qu'il y a encore beaucoup d'injustices dans le monde, ça aurait été plus fort d'évoquer une injustice domestique (mais peut-être qu'il aurait fallu la montrer et ça aurait été moins élégant, mais c'est un cas où le discours doit primer je pense). |
j'ai espéré un moment un grand film sur la justice digne de Lang, Capra, Lumet, etc, mais au final on a un beau film historique sur une figure héroïque reconnue par les siens, ce qui est un peu décevant...A ce niveau Munich était plus ambitieux |